Jeunesse et Sports : pour un département ministériel au service de l’éducation

De l’abandon de la mission éducative, et de la privatisation du sport

Exposé au risque d’une conception financière et comptable de la gouvernance du sport en France, l’ex-ministère de la  Jeunesse et des Sports voit ses compétences éclatées entre d’une part le ministère des Sports, de plein exercice et confié à Laura Flessel, et d’autre part la Jeunesse et l’Éducation Populaire isolée dans une direction placée au sein du ministère de l’Éducation Nationale à Jean-Michel Blanquer.

Cette séparation a pour conséquence de cliver arbitrairement une mission commune d’éducation hors de l’École. Dans les faits, cette césure Jeunesse / Sports prépare son extinction au sein du service public d’État, en la dénaturant définitivement pour la réduire à des dispositifs de réglementation et d’encadrement social des activités.

Alors que l’attribution des Jeux Olympiques à la France en 2024 aurait pu constituer un levier majeur pour augmenter les moyens nationaux en faveur du Sport français et des politiques publiques territoriales, il fournit au contraire l’occasion de l’externaliser dans les faits au CNOSF (30%) au sein d’une gouvernance partagée avec l’Etat (30%), les collectivités (30%) et le monde de l’entreprise (10%). Une structure nationale est ainsi mise en perspective d’ici 2019, avec des déclinaisons régionales. Le Conseil National du Développement du Sport (CNDS) et ses modes de gestions nationaux et régionaux disparaîtraient, intégrés dans une nouvelle structure hybride destinée à capter des capitaux privés. Les 1 600 cadres techniques sportifs de l’actuel ministère des Sports sont ainsi voués progressivement à une modification profonde de leur statut public. Cela correspond directement à la destruction d’emplois et à la réduction du périmètre de l’État dans le cadre des orientations voulues pour 2022. La prolifération des agences prépare partout la dégradation des statuts des personnels.

La ministre affirme, à qui veut la croire, le maintien du ministère des Sports alors que ses effectifs seraient ainsi amputés de plus de la moitié, et ses moyens issus du loto sportif voués à d’autres circuits d’attribution, exposés aux lobbies. Quel volume, quel intérêt aurait un ministère des Sports de pure réglementation regroupant à peine 1 000 agents entre l’inspection et le solde des cadres techniques restant ?

Versant Jeunesse Éducation Populaire que peuvent devenir 500 conseillers et quelques dizaines d’inspecteurs noyés dans des directions départementales interministérielles placées sous l’autorité de Préfets étrangers à l’action éducative complémentaire à l’École, ignorant ses temporalités et tensions sociales ?

Pour une réunification de la Jeunesse et des Sports au sein du ministère de l’éducation nationale

La privatisation rampante voulue pour la gouvernance du sport, suite directe de la RGPP/MAP, ne peut avoir qu’une conséquence fatale sur les métiers et missions éducatives des cadres techniques et par voie de conséquence sur la totalité de la filière des emplois liés à la Jeunesse et aux Sports.

En tant que syndicat multicatégoriel et général de branche, EPA-FSU maintient la nécessité d’un rattachement au sein d’un pôle interministériel du ministère réunifié Jeunesse et Sports. Il réaffirme la nécessité de sortir de la gestion mortifère des ministères dits sociaux et de sa DRH. Il confirme le rattachement de l’ensemble des personnels de ce ministère recomposé à l’échelon régional au sein de directions spécifiques mises en réseaux avec les établissements, dotées de délégations territoriales.

Dans l’hypothèse d’une scission entretenue entre le Sport et l’Éducation Populaire et la Jeunesse, EPA-FSU considère que seul un retour aux sources éducatives de la Direction des Sports, et de la DJEPVA, au sein du ministère de l’Éducation Nationale peut constituer une voie de rebond au service du sens des missions d’émancipation et d’éducation permanente en prolongement de l’École. Laisser subsister la déshérence serait une capitulation face aux reculs récurrents des politiques publiques.

Personnel technique et pédagogique ne se résume pas à un statut de fonctionnaire ou d’agent interministériel. Sortir des ministères sociaux, des DDI et directions régionales interministérielles permettrait de renouer avec une notion de l’intérêt général déconnectée des commandes institutionnelles conjoncturelles. Cela est la seule issue pour redonner du sens à des filières et des métiers de l’éducation.

Motion votée à l’unanimité au Congrès de Noirmoutier, le 25/06/18