Le remaniement nouveau est arrivé… il a un goût de banane !

Faire du neuf UMP avec du vieux RPR ? Croire qu’un jeu de chaises musicales efface les fausses notes du passé relève d’une pensée bien naïve. Comment croire, au royaume de la talonnette, qu’un simple jeu de marionnettes peut effacer des charters, des bulldozers contre des Roms, des circulaires dignes de Vichy, des régressions en tous genres baptisées de progrès ? Nous sommes en automne et nous savons tous que la chasse est ouverte, de préférence contre les services publics et la protection sociale, les espèces nuisibles issues du programme du Conseil National de la Résistance.

Mais aujourd’hui surprise ! Au fond de la pochette un ministre et son portefeuille plus ou moins bien découpés pour un changement dans la continuité !

Pour le secteur d’activité « jeunesse et sports », un nouveau chamboulement est à subir dans l’organisation des ministères de compétences. En 2007, nous avons fait un saut en arrière de 70 ans avec un rattachement du sport au ministère de la santé. Les pratiques sportives malgré leur développement extraordinaire (diversité des pratiques et des pratiquants) ne mériteraient finalement que d’être considérées à travers le prisme de la santé… Personne n’y a évidemment adhéré ! Le secrétariat des sports s’est résumé à une agence de communication pour rendez-vous médiatiques. Dans cette vitrine ministérielle, l’ex secrétaire d’État désormais évincée a pu tenir des discours intéressants sur le sport (nous aurions pu les signer!) dont la mise en œuvre a souvent été le contraire. La Jeunesse et l’Éducation Populaire se sont noyées dans de la solidarité active de communication, de la transparence et l’absence d’ambition politique pour les agents en charge de ses missions dans les services. Le vide a présidé les mandatures, avec des programmes volatiles destinés à remplacer les missions de service public. Que ces programmes s’appellent « service civique » ou « envie d’agir » ne change rien à la vacuité.

Aujourd’hui, nous revenons simplement à la situation de 2002, avec un rattachement de la Jeunesse et de la Vie Associative au ministère de l’éducation nationale et un ministère des Sports de plein exercice. Soit un ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative : Luc CHATEL avec une secrétaire d’État à la jeunesse et à la vie associative rattachée : Jeannette BOUGRAB, ex présidente de la HALDE nommée par le Président de la République lui-même. Une ministre chargée des sports : Chantal JOUANNO. Il reste également une menace sur notre secteur, notamment pour les collègues dans les DDI, avec un ministère chargé de la cohésion sociale à la charge de Roselyne BACHELOT. Personne ne sait ce qu’est vraiment la cohésion sociale, mais une grande majorité des responsables politiques sont d’accord avec ce « concept », ce qui est douteux ! « Tout » étant finalement une histoire de « cohésion sociale », la tentation est grande de nous y associer. Les économies structurelles mises en avant par la RGGP ne s’appliquent pas au gouvernement. Là où en 2002, il suffisait d’un ministre de plein exercice, nous en avons désormais quatre en 2010 pour s’occuper de nos cas. Serions-nous plus nombreux ?

« Casser les cultures »

Ces différents chamboulements « organisationnels » sont une arme redoutable pour casser nos cultures. À travers les métiers de conseillers techniques et pédagogiques (corps spécifiques à Jeunesse et Sports) et de l’ensemble des personnels administratifs qui contribuent à la réussite de ces missions, nous défendons des cultures, à travers des techniques, des compétences et une expérience reconnues. Parfois, l’ex inspection JS, spécifique elle aussi, a pu être une alliée. Mais, la RGGP aidant, il s’agit pour nos gouvernants de ne jamais vraiment arrêter sous un vocable qui fait sens, la mission éducatrice de l’État dans le champ de la Jeunesse, de l’Éducation Populaire et des Sports et des agents qui en ont statutairement la charge. Le retour de la Jeunesse à l’éducation nationale peut être perçu comme une « coloration » éducative à cette mission mais avec quelle ambition ? Vendre du service civique ?

Les missions sont dispersées entre les ministres comme les agents sont évaporés dans des services isolés sans aucune visibilité politique et des possibilités d’intervention limitées aux injonctions préfectorales. La tentation est grande pour les syndicats « corporatistes » (majoritaires dans le réseau JS) de défendre les intérêts particuliers de chaque corporation, se réjouissant sans aucun doute de la séparation entre la jeunesse/éducation populaire et les sports. Cela nous semble une erreur redoutable aboutissant à la défense d’intérêts qui n’ont aucune raison de s’opposer (intérêt des profs de sports contre ceux des CEPJ !) et contribuent à un repli sur soi et à la division. Il s’agit pour nous au contraire de défendre une histoire et des modalités d’interventions communes mais des domaines d’interventions spécifiques. Nous devons défendre ensemble nos différences culturelles pour qu’elle ne soient pas phagocytées notamment par la cohésion sociale, car si nos cultures disparaissent nous n’avons plus de raison d’exister. Revendiquons notre appartenance à « Jeunesse et Sports » car cela fait sens pour les collègues dans les services et pour l’usager. C’est également un formidable pied de nez à l’administration qui rêve de nous « acculturer ». L’acculturation, c’est LA disparition. Pour faire disparaître un peuple et ses racines (réserves indiennes, esquimaudes, esclaves d’Afrique…) l’acculturation s’est toujours révélée aussi efficace que l’extermination. Toutes proportions gardées ce phénomène est à l’œuvre dans la fonction publique aujourd’hui : suppressions physiques d’emploi et broyage des missions. L’acculturation, c’est constituer une culture commune pour cautionner les suppressions de postes. L’ensemble des agents en poste dans les DDI et les DRJSCS sont concernés par cette entreprise : avoir des fonctionnaires polyvalents, compétents quelque soit leur statut, leur formation pour travailler aux services vétérinaires, à l’action sociale ou aux sports, en fonction des besoins du service ! Nos cultures sont nos richesses, défendons-les ! Aux cultures communes, préférons les revendications communes !

Fabrice VERAY et Didier HUDE