Harmonisation du temps de travail = Haro sur l’éducation nationale !

Le mercredi 25 mai, une réunion s’est tenue à la DRH des ministères sociaux pour traiter de « l’harmonisation du temps de travail » dans les services déconcentrés des DRJSCS et à l’administration centrale. Le sort des DDCS et DDCSPP a commencé à être traité quant à lui en mars, au sein du CTP central des DDI car ces services échappent à l’autorité des ministres du champ santé/travail/équipement/jeunesse et sports/ville/cohésion sociale, puisque placés sous celle du premier ministre et des préfets de département. Rappelons (cf. Traverses supplément 1 au n° 72) que les personnels administratifs sont exposés à voir leurs congés racornis pour la filière administrative de l’éducation nationale et les inspecteurs se voient retirer, en temps de corps, le « bénéfice » de l’article 10 du décret FP 2000-815.

Une « concertation » de façade oubliant les CREPS et sans pilotage ministériel clair
Le SNAPS-UNSA a demandé l’élargissement des termes du débat aux établissements (CREPS, écoles nationales…) en rappelant que l’autonomie des chefs de services ne pouvait valoir multiplicité des règlementations. Sans répondre franchement positivement, la DRH a reconnu que le chantier pouvait valoir guide pour les établissements. EPA-FSU a demandé à la DRH des ministères sociaux si elle avait un mandat quelconque du ministère des sports pour ses agents (professeurs de sports en particulier) et de celui de l’éducation nationale pour les personnels JEP et la filière administrative et ouvrière. La DRH a répondu qu’elle avait un mandat global sur le sujet et qu’elle avait compétence puisqu’on lui confiait le chantier de gestion permanente des ministères sociaux. La FSU a fait valoir que cette affirmation n’était en rien suffisante, d’autant que l’expérience des DDI donnait le sens recherché : en finir avec les spécificités de RTT « éducation » et aligner tout le monde sur une gestion à l’année civile incompatible avec les mouvements de l’éducation nationale à l’année scolaire devenue d’ailleurs la véritable année sociale.

Mésentente syndicale et clivage JS/santé
Le SNAPS a d’emblée défendu l’article 10 des personnels techniques et pédagogiques. Cela a eu pour effet de faire sortir de leurs gonds deux représentantes de la CGT (dont l’une siège au CTP central DDI). Elles ont indiqué en substance que la définition des conditions de travail et d’emploi relevait d’une gestion collective qu’il fallait les unifier au sein d’espaces de travail eux aussi collectifs où il n’y avait pas de place « pour des pratiques de salariés se voulant indépendants » (sic). Même en temps de guerre froide avec l’encadrement au sein de l’ex réseau JS on n’avait pas trop entendu ce refrain ignorant du fait que plus de 1 000 cadres techniques exercent leur métier « auprès » du mouvement sportif et plus de 1 500 CAS et CEPJ sont non pas soumis à un décompte horaire et journalier mais à des contrats d’objectifs annuels ne supposant pas de contrôle précis du temps de travail. La CFDT est venue en renfort de la CGT dans le concert du haro sur l’indépendance des cadres techniques JS. Plus tard le syndicat autonome des inspecteurs de l’action sanitaire (SNIASS, appelé à intégrer l’UNSA et peut-être à fusionner avec le SEJS-UNSA (encadrement JS) ira jusqu’à intervenir après la FSU qui défendait l’article 10 pour l’inspection en indiquant qu’il ne peut y avoir différence de traitement entre inspecteurs dans les DDI et DR. Ce fut un grand moment d’unité syndicale et de débats sur le fond. Les prérogatives supposées de l’éducation doivent disparaître et le syndicalisme des agents de la santé n’est d’aucun renfort ! C’est même tout l’inverse.

L’assimilation en marche
Ce qui se profile va dans le sens d’un arasement des modes de gestion éducation nationale. L’administration souhaite aboutir au plus tard avant la fin de l’année 2011 pour être opérationnelle dès le 1er janvier 2012.
Les personnels l’éducation nationale des deux filières administratives et ouvrières se verront proposer un nouveau décompte des jours ARTT très certainement moins favorable à celui en cours actuellement avec pour compensation un régime indemnitaire qui pourra être aligné sur celui des C et B des ministères sociaux. Mais à une condition : solliciter un détachement, voire une intégration dans les corps d’accueil santé/travail. Tous les personnels du réseau JS (inspection, personnels sports et JEP, administratifs et ouvriers…) perdront leur gestion à l’année scolaire pour se voir appliquer dès 2012 l’année civile qui est purement administrative. L’alignement sera ainsi consommé. La DRJSCS d’Alsace s’est illustrée dans cette demande insistante où l’éducation nationale a été présentée comme un contre exemple passéiste aux rythmes et lourdeurs de gestion « restées au 20e siècle » (sic).

Les personnels d’inspection JS en DR seront alignés sur le régime imposé en DDI. Ils pourront individuellement demander à leur chef de service le bénéfice de l’article 10 (qui pourra accepter ou refuser) s’ils ne font pas partie de l’équipe de direction ou de ses collaborateurs immédiats. Idem pour les attachés de l’éducation nationale. Seuls les membres de l’encadrement des DR et les personnels techniques et pédagogiques se verront reconnaître a priori le « bénéfice » de l’article 10.

Tous ceux qui ne seront pas sur l’article 10 auront un décompte hebdomadaire du temps de travail sur la base de 3 cycles possibles : 36 heures, 37 heures trente ou 38 heures 30. L’administration indique qu’on peut éventuellement penser à un quatrième cycle… En clair pour les personnels administratifs c’est passer de 50 jours à 46 jours de congés par an pour un même horaire ! Tel apparaît être le deal de l’harmonisation par le bas qui se profile. D’autant que si les agents veulent garder leur statut éducation nationale cela se fera sans revalorisation indemnitaire. Les demandes de réintégration seront ainsi encouragées.

Aujourd’hui, pour 38H30 de travail les personnels de la Santé disposent de 25 jours de congés + 14 jours d’ARTT + 2 jours fractionnés et 5 jours consécutifs appelés « semaine d’hiver » non sécables. Ces 5 derniers jours seraient transformés en jours ARTT, identifiés comme tels et deviendraient sécables. Les personnels santé/travail auraient donc un régime maintenu de 46 jours par an se répartissant en 25 jours + 2 de congés et 19 jours d’ARTT. C’est un gain très relatif puisque le nombre de jour est inchangé mais on gagne en fluidité sur 5 jours ! Cela s’appelle un
marché de dupes.

Les personnels « éducation » ont aujourd’hui environ 50 jours de congés (dont 23 ARTT banalisés avec les congés) pour 38H30 de travail. Il y aurait donc « perte harmonisée » de 4 jours en moyenne. Cette dernière (au nom du travailler plus pour gagner plus) serait compensée par une revalorisation indemnitaire de plusieurs centaines d’euros par an (alignement sur les C et B santé/travail). Mais pour cela la carotte de l’intégration (changement de corps) ou du détachement est brandie.

Pour l’inspection ex JS non éligible à l’article 10, pour 38H30 hebdomadaires de travail, le régime serait de 46 jours, donc inchangé par rapport à aujourd’hui. Mais il y aurait décompte hebdomadaire du temps de travail ! Les personnels de l’administration centrale n’étant pas en position d’encadrement perdraient tous le bénéfice de l’article 10 si ils l’ont pour passer sur un régime hebdomadaire du temps de travail, sauf exceptions dûment listées (cadres techniques de préparation olympique :haut niveau, missions itinérantes et récurrentes, cadres d’emplois très atypiques…). L’alignement sur 38H30 est à prévoir avec un régime de congés de 25 jours + 2 de fractionnement + 19 ARTT.

L’identification des jours ARTT est un risque majeur
Dans l’ex réseau JS, la banalisation des jours ARTT rend l’utilisation très souple et « de droit » avant même d’avoir à constater la possibilité d’utiliser les jours ARTT qu’il convient d’avoir « réellement » acquis avant de pouvoir les déposer. Cette pratique souple pourrait être revue au nom une obsession textuelle distinguant les 25/27 jours de congés des 19 jours ARTT.

Au sein du réseau jeunesse et sports, la CGT (SNPJS), L’UNSA-Education et la FSU se sont déterminées pendant les échanges sur des positions proches. En l’absence des inspecteurs JS de l’UNSA et de la CFDT c’est la FSU qui a défendu la nécessité de l’article 10 reconnaissant des sujétions globalement équivalentes à celles des PTP ! Il ne ferait pas bon avoir des inspecteurs a priori sur des profils administratifs et des PTP chargés de les remplacer dans de multiples tâches de contrôles et représentations dont ils seraient détournés. La fusion IASS/IJSL pèse très lourd dans la logique d’une fusion qui deviendrait fatale à la dimension pédagogique ! C’est là que le syndicat autonome de l’inspection est venu jouer sa petite musique contre la FSU.

Mutisme assourdissant des syndicats CGT, CFDT ; UNSA de la santé ! FO s’est tenu au silence, indiquant cependant que la RGPP témoignait de toute sa nocivité. L’UNSA santé s’est murée dans le silence, laissant la CGT et la CFDT s’opposer le plus directement au SNAPS et à la CGT JS, voire à la FSU.

La partie se rejouera le 15 juin prochain. La ligne directrice est claire : en finir avec l’héritage de l’éducation nationale et des spécificités technico pédagogiques obsolètes au vu des nouvelles missions que l’Etat doit avoir, en se recentrant sur un « coeur de métier » principalement régalien. La question de la mise en action se pose car à ne pas pouvoir réagir aux dégradations les personnels vont perdre de plus en plus et travailler plus pour à terme gagner moins.

Depuis des mois, EPA en appelle à une action collective urgente passant par des paralysies de fonctionnement en DD et DR. Sans rapport de force direct dans les services l’ex réseau JS est appelé à disparaître avec la bénédiction des représentations administressantes dominantes. Assister impuissant à la mise à mort est insupportable à tenir quand l’unité syndicale est impossible à réaliser parce que certains en fait ne sont que dans un syndicalisme d’accompagnement et d’autres sur des postures de radicalité en contreplaqué.

D. Hude