Le CNDS ? Ou comment ne plus parler de sport…

CNDS, Orassamis, préciputs, enveloppes, seuils, commissions territoriales, publics cibles, QPV, ZRR…

N’en jetez plus, la coupe est pleine !

Depuis longtemps, les crédits d’intervention du budget sport de l’Etat diminuent de façon vertigineuse. Les crédits issus de la loterie et des droits de retransmission télévisée (FNDS puis CNDS) ont eux augmenté jusqu’à l’année dernière. Ces crédits, comme chacun le sait, ne sont pas un moyen d’intervention directe pour l’Etat puisqu’ils sont « cogérés » avec le mouvement sportif et les collectivités territoriales qui pèsent de plus en plus lourd. Cette cogestion n’est pas la seule responsable du désengagement de l’Etat. En effet, les orientations et les directives de l’établissement prises par le ministre chargé des sports vont toutes dans le sens d’une gestion technico-politico-administrative des fonds au détriment de l’action technique et pédagogique des professeurs de sport.

Dans les organigrammes des DRJSCS ou des DDI, on trouve systématiquement des coordonnateurs, des référents ou des correspondants CNDS. Qu’est-ce que cela signifie ? A-t-on oublié que le CNDS est un outil, un moyen de financement et que le véritable enjeu est le développement du sport pour tous ?

Une dégradation du travail, une mutation qui fait sens

Des collègues, professeurs de sport, suivent plusieurs dizaines de disciplines sportives différentes, certains même la totalité des disciplines de leur territoire. Il leur est impossible de mener à bien une action de conseil et d’expertise vis-à-vis du mouvement sportif et d’ailleurs ce n’est plus ce qu’on leur demande. L’enjeu pour les délégués territoriaux est tout autre : il faut que chaque année l’argent soit consommé et la base ORASSAMIS renseignée. Il faut prendre en compte des critères d’éligibilité de plus en plus discriminatoires et ciblés au détriment du sport pour tous afin de justifier les baisses de crédits. Les seuils de subvention sont de plus en plus élevés pour éviter le soi-disant « saupoudrage ».  Or, ce saupoudrage qui permettait de financer des petits clubs était assuré par l’Etat ; aujourd’hui, le relèvement du seuil a donné le droit aux grosses structures d’accomplir cette tâche par le biais de la mutualisation. Cette nouvelle donne correspond à un transfert de la répartition des subventions par l’État vers le mouvement sportif. La neutralité qui prévalait avec les  professeurs de sport est désormais compromise par la complexité des relations entre élus d’une même discipline. Plus aucun territoire n’échappe désormais aux « arrangements » et ajustements locaux prenant allure de clientélismes au demeurant parfois avoués.

Continuons comme cela et dans très peu de temps, le mouvement sportif ou les collectivités territoriales prendront complètement la main sur cette manne que l’Etat ne fait plus que gérer. A quoi bon avoir des professeurs de sport dans les services si leurs compétences ne sont pas utilisées ?

Un autre mode est possible…

Dans quelques régions, des collègues proposent des solutions pour assurer un accompagnement du mouvement sportif qui leur permette d’apporter une plus-value dans le développement du sport pour tous. Il s’agit de faire en sorte que chacun des CAS d’une région assure un accompagnement d’une, deux ou trois disciplines sportives (du club à la ligue ou comité régional). Avec ce fonctionnement, chaque PTP sport pourrait développer une connaissance plus fine des disciplines dont il serait le référent et serait davantage reconnu comme expert. De son côté, le mouvement sportif n’aurait plus (ou bien moins) tendance à considérer leur conseiller référent comme un gestionnaire du CNDS. Il gagnerait un traitement plus homogène au niveau territorial car les collègues auraient une perception globale de chaque discipline. En effet, depuis de nombreuses années, d’aucuns remarquent des disparités en fonction du territoire dans l’accompagnement et le financement pour une même discipline.

Cette proposition a souvent été rejetée par les directeurs départementaux qui ont peur de perdre des effectifs, des moyens financiers et du temps disponible pour les contrôles…

Affirmons-le et retrouvons du sens : le CNDS n’est pas la clé d’entrée pour une politique sportive mais simplement un moyen qui ne doit pas dicter le mode d’intervention des professeurs de sport.

Avec la réforme territoriale et en particulier dans les régions fusionnées, le risque d’encore plus cloisonner les collègues en DDI et d’augmenter des inégalités de traitement est grand. L’isolement des DDCS/PP sous la coupe des préfets et du premier ministre expose le ministère à une disparition programmée. La création d’unités territoriales dépendant de la DRJSCS est d’une grande urgence.
EPA porte ce mandat dans la FSU et auprès du gouvernement.

EPA s’oppose fermement aux différentes mesures (relèvements de seuil,  division par deux du nombre de bénéficiaires, etc.) qui sont destinées à faire des économies sur la gestion des fonds, qui vont à l’encontre de la réduction des inégalités à l’accès au sport et qui amenuisent irrémédiablement les missions techniques et pédagogiques des professeurs de sport.

Enfin, EPA revendique de vrais moyens publics pour une vraie politique sportive nationale et le doublement du budget sport et JEP de l’État.

Pierre LAGARDE